Les objets transneptuniens sont tous les corps qui gravitent autour du Soleil et dont l'orbite est située au-delà de Neptune. Je m'intéresse particulièrement aux objets les plus lointains de la ceinture de Kuiper : malgré des perturbations orbitales très faibles, ces objets ont des orbites très excentriques, ce qui indique qu'ils ne se sont pas formés tels qu'on les observe aujourd'hui.
Les différentes populations d'objets transneptuniens ont une dynamique orbitale extrêmement riche et variée. Leurs trajectoires incluent aussi bien des cycles quasi-périodiques très stables que des diffusions chaotiques violentes, et certains objets sont même soumis à des impulsions stochastiques dues à des passages d'étoiles au voisinage du Soleil. Mes travaux récents sont synthétisés dans un article de revue qui fait le lien entre les types de dynamique connus et les différentes régions au-delà de Neptune [xii].
Je suis impliqué dans un projet mené en collaboration avec Marc Fouchard et Alexandre Bougakov (France), Arika Higuchi et Takashi Ito (Japon), Vacheslav Emel'yanenko (Russie), Hans Rickman (Suède), et Giovanni Valsecchi (Italie). Nous recherchons des signatures observables de la distribution initiale des objets transneptuniens et de la trajectoire du Système solaire dans la Galaxie.
Je poursuis une analyse globale de la dynamique orbitale des objets transneptuniens à travers des modèles semi-analytiques, qui permettent l'identification et la compréhension fine des routes dynamiques rendues accessibles par les perturbations planétaires [ii]. Ces modèles révèlent des trajectoires menant à des orbites très distantes et excentriques, de même que des « mécanismes de capture » capables de maintenir les objets sur des orbites éloignées pendant des milliards d'années [iii]. Cela crée un réservoir d'objets éloignés qui est continuellement approvisionné en nouveaux objets.
L'application aux objets transneptuniens connus montre graphiquement quelles orbites observées nécessitent un scénario complexe (comme la migration planétaire ou un perturbateur extérieur) et lesquelles peuvent être expliquées simplement par l'influence des planètes connues sur leurs orbites actuelles [iv].
Au-delà de quelques centaines d'unités astronomiques, le champ gravitationnel de l'ensemble de la Galaxie produit une attraction différentielle sur les objets transneptuniens. Cet « effet de marée galactique » est le principal responsable de l'apparition de comètes à longue période.
La région transneptunienne est l'unique témoin des variations de l'environnement galactique du Système solaire. Sur de longues échelles de temps, les marées galactiques modifient les orbites des objets lointains de la ceinture de Kuiper, produisant de grandes régions chaotiques [xi]. La zone intermédiaire entre la ceinture de Kuiper et le nuage de Oort est donc beaucoup moins « inerte » que ce que les astronomes pensaient précédemment. Pour en savoir plus, lire la lettre d'information n°164 de l'IMCCE.
En 2016 a été remise au goût du jour l'hypothèse d'une planète massive, encore inobservée, dont l'orbite se trouverait au-delà de Neptune (la « Planète 9 »). L'existence d'une telle planète permettrait d'expliquer pourquoi les orbites excentriques des objets transneptuniens les plus lointains (demi grand axe plus grand que 200 unités astronomiques) semblent pour la plupart alignées ou anti-alignées.
Si le Système solaire contient une telle planète extérieure massive, la dynamique orbitale des objets transneptuniens lointains devient très chaotique. Le chaos séculaire se développe à partir des points de stabilité du mécanisme de Kozai. Plus un objet transneptunien est loin, et plus le chaos se propage sur toute la gamme de son inclinaison orbitale, lui permettant de basculer entre des orbites progrades et rétrogrades [v]. Au milieu de la mer chaotique, des résonances séculaires produisent des trajectoires alignées ou anti-alignées avec l'orbite de la Planète 9. Ces configurations sont le fruit d'accumulations statistiques de trajectoires chaotiques ; la réfutation de l'hypothèse « Planète 9 » requiert donc un échantillon statistique très important (tandis que l'observation directe de cette planète suffirait à prouver son existence).
Dernière mise à jour : 02/2021.